mardi 16 juin 2009

Une charte pour le CNU

Les propositions de l’ASES.

L’ASES est soucieuse de garantir la collégialité des décisions concernant « l’évaluation » individuelle des enseignants-chercheurs, de leurs projets et des équipes dans lesquelles ils s’intègrent. Fondée sur l’appréciation de la qualité scientifique des travaux et de leurs apports à la discipline, la délibération entre pairs est la condition de la construction autonome des savoirs et de la qualité du travail universitaire. Elle constitue le meilleur rempart contre toutes les décisions arbitraires.
Depuis plusieurs années, l’ASES souhaite une plus grande transparence des procédures de recrutement et de qualification mises en œuvre par les commissions de spécialistes et par le CNU. Le mouvement actuel, sans précédent, de mobilisation du monde universitaire et de la recherche a rendu possible de nombreux échanges entre collègues appartenant à des disciplines ou à des corps différents. Il ressort de ces fructueux échanges qu’une même structure d’évaluation (CNU, comité national de la recherche scientifique ou commission de spécialistes) peut, selon les disciplines et les périodes historiques, adopter des modes de fonctionnement très variables, plus ou moins satisfaisants au regard des principes énoncés plus haut. La confrontation de ces expériences permet de dégager certaines règles ayant eu pour effet de favoriser l’adoption de pratiques vertueuses.
Face à l’extension programmée des attributions du CNU, et notamment la mise en place d'une évaluation individuelle des enseignants-chercheurs déterminante non seulement pour leur carrière mais aussi pour les conditions d'exercice de leurs activités de recherche, l’ASES préconise l’adoption de l’ensemble des principes suivants par la section 19 du CNU :

Un principe général d’évaluation:

1) Le CNU rejette toute évaluation purement quantitative des dossiers. Les critères bibliométriques (classement des revues, index de citations …) ne peuvent se substituer à l’évaluation de fond des dossiers qui passe par la lecture effective des travaux des candidats. Les ouvrages de recherche, essentiels en sciences sociales, doivent être autant pris en compte que les articles de revues scientifiques.

Une transparence nécessaire :

2) Le CNU s’engage sur un certain nombre de règles déontologiques :
-interdiction à tout membre de rapporter sur un candidat dont il aurait dirigé (ou été membre du jury), la thèse ou l’habilitation, de prendre part au débat et au vote dans le cas de conflits d’intérêts (liens familiaux, conjugaux, de travail).
- interdiction de promouvoir ses membres, élus ou nommés pendant la durée de leur mandat. La durée de celui-ci pourrait, du coup, être raccourcie et/ou limitée.
- affichage des CV des candidats à l’élection sur les listes syndicales, au même titre que leur profession de foi, comme le précise le nouveau décret.

Des moyens pour le CNU
:

3) Les tâches constitutives du travail de qualification dont les membres du CNU ont la responsabilité doivent donner lieu à des décharges de service plutôt qu’à une augmentation des indemnités accordées. Par ailleurs, l’ASES s’oppose à toute extension des attributions du CNU qui ne s’accompagnerait pas d’une augmentation significative du nombre de membres élus siégeant dans cette institution.

4) Il apparaît nécessaire de créer un secrétariat scientifique, comme pour les sections du comité national du CNRS. Le secrétaire scientifique élu au sein du collège B, serait l’auxiliaire du président et l’interface entre les enseignants-chercheurs, les laboratoires et la direction du CNU. Le fonctionnement de ce secrétariat suppose, en amont, de la part de la section, une formalisation des critères à l’aune desquels les enseignants-chercheurs, aux différentes étapes de leur carrière, seront jugés ; la rédaction de normes présidant à l’élaboration des rapports d’évaluation, la définition de règles de vote. Le secrétariat scientifique est donc chargé : en amont de la session de collecter les rapports ; pendant le session, de rappeler les consignes et les règles de vote puis, en aval, de relire et de corriger les rapports d’évaluation, de rédiger les compte-rendu des travaux de la section, de suivre les décisions et l’accompagnement des enseignants chercheurs.


Les conditions de l’expertise des dossiers :

5) Les rapports établis doivent obéir à des conditions de forme. Ainsi ils ne peuvent être lapidaires (deux pages au moins pour un rapport d’évaluation sur 4 ans), et doivent être rigoureusement étayés , évaluant les qualités des dossiers par rapport aux critères affichés par la section. Ces rapports seront déposés au secrétariat scientifique de la section, avant l’ouverture des délibérations.

6) Un tableau de synthèse des dossiers sera établi par le secrétariat scientifique et distribué à tous les membres de la section le jour de la délibération.


7) La discussion sur les dossiers présentés devra permettre à la section de s’accorder sur un avis motivé, qui sera mis au vote.

8) En fin de session, seront diffusées les données annuelles permettant de faire le bilan des candidatures et des décisions de qualification et de solliciter, plus ponctuellement, des analyses longitudinales thématiques.


Les principes généraux énoncés ci-dessus sont considérés comme garants d’une véritable collégialité des décisions concernant la carrière des enseignants-chercheurs et doivent s’appliquer à l’ensemble des autres instances évaluatrices existantes (ANR, AERES, comités de sélection, etc.).

Texte adopté à l'unanimité lors de l'assemblée générale de l'ASES réunie à Paris Dauphine le 13 juin 2009.